Avant, Thomas Lemoine gérait un troupeau de vaches laitières et consacrait une partie de sa SAU à des grandes cultures. Et puis en 2015, il a décidé d'arrêter le lait et de passer en bio. Depuis, il a 50 ha de SAU en prairies et 200 ha qui reçoivent une diversité de cultures, de la moutarde au tournesol en passant par le blé, l'avoine, le sarrasin ou bien l'épeautre...
Jeudi 9 juin, une visite de quelques-unes de ses parcelles était organisée par Agrobio 87 et la Corab, la Coopérative régionale d'agriculture biologique (voir encadré), auprès de laquelle Thomas Lemoine commercialise sa production depuis 4 ans.
La moutarde blanche
La visite débute par une parcelle de 10 ha de moutarde blanche. Interrogé sur la mise en place de la culture, Thomas Lemoine raconte : "Je laboure puis je roule le sol pour avoir un sol frais et fin. Il ne faut pas de miettes car la graine est très fine. Je l'ai semée le 18 avril à une densité de 10 kg/ha. Je n'ai pas amené de fertilisation même si la moutarde aimerait bien un peu d'azote. Je ne mets que des pailles, jamais d'engrais organique." Il avoue essayer de réfléchir à une solution afin d'améliorer les ressources en azote pour ce type de culture, mais "sans se ruiner". "Je ne veux pas apporter de produits supplémentaires qui fourniraient certes un meilleur rendement mais me rendraient tributaire", reconnaît-il. Il préfère privilégier "une gestion de l'assolement et des couverts végétaux".
Ce printemps, sa parcelle de moutarde blanche a rencontré de nombreuses attaques de méligèthes qui, comme sur le colza, sont des ravageurs avant de devenir des auxiliaires. Des boutons floraux ont été piqués et ne donneront pas de siliques. Lou Bugeia-Gane, technicienne à la Corab, révèle qu'il existe des moyens naturels, à base de savon noir, pour limiter les dégâts des méligèthes. Quoi qu'il en soit, la moutarde sera récoltée début juillet, "selon la météo", note Lou Bugeia-Gane, et elle servira ensuite à la fabrication de mayonnaise et de moutarde légère. Ce type de culture présente en moyenne un rendement de 1 tonne/ha.
Le sarrasin, une plante facile
La visite se poursuit. Direction un ensemble de parcelles où est implanté du sarrasin. "Le semis a été fait fin avril, en ligne à raison de 50 kg/ha", indique Thomas Lemoine.
"Le sarrasin est une plante facile et qui permet de gérer les adventices, explique Lou Bugeia-Gane. Mais sa récolte n'est pas facile car c'est une plante à floraison indéterminée qui reste tout le temps verte. On propose donc une astuce : il s'agit de faucher quand la plupart des grains sont mûrs (généralement vers fin juillet-début août), de laisser sécher la plante au sol puis de ramasser avec une moissonneuse batteuse pour récolter le grain sur du sec", explique-t-elle.
Le potentiel de production géré par la Corab en sarrasin est de 700 à 800 ha. Les grains servent à fabriquer de la farine ou du grain décortiqué utilisé toasté ou dans les pains.
On continue et là une parcelle de blé jouxte celle de sarrasin. Quand le grain sera récolté, la paille sera broyée pour retourner au sol. Ici, "ce choix est important car il n'y a aucun apport de matière organique", souligne Lou Bugeia-Gane. Le rendement ne sera quant à lui pas mirobolant puisqu'il devrait être inférieur à 20 quintaux/ha. Mais "il est mené sans intrant, donc c'est tout bénéf", reconnaît Thomas Lemoine.
On continue encore et on tombe sur une parcelle d'avoine nue dont le grain n'a pas d'enveloppe. "Elle servira à faire du lait d'avoine ou bien des flocons. Elle sera récoltée dans la deuxième quinzaine de juillet", indique Lou Bugeia-Gane.
Alterner printemps/hiver
Pour mener toutes ces cultures, en limitant les frais le plus possible, Thomas Lemoine tourne sur une même parcelle avec une culture de printemps (par exemple la moutarde blanche, le tournesol - il en a implanté 34 ha cette année, tout a été désherbé mécaniquement - ou le sarrasin) puis une culture d'hiver afin de gérer au mieux les adventices. La nature du sol, un limon battant plutôt sableux, l'oblige à labourer devant chaque culture. Ensuite prudence : "Je mets le moins d'intrants possible, c'est un risque. Mais aujourd'hui j'ai peu de charges sur mon exploitation, très peu sur le matériel, encore un peu sur les terres. C'est un choix", conclut-il, en soulignant néanmoins que tout le monde ne peut pas faire le même.