Culture

Un monde de lumières au musée

Nouvelle Aquitaine / Haute-Vienne
Martine Tandeau-de-Marsac a participé à la mise en place de l'exposition "Un monde de lumières au Musée".
Martine Tandeau-de-Marsac a participé à la mise en place de l'exposition "Un monde de lumières au Musée".
livres sur Francis Chigot
livres sur Francis Chigot
Quelques-uns des vitraux signés Francis Chigot.
Francis Chigot, maître verrier limougeaud, est à l'honneur jusqu'au 12 février au musée des beaux arts de Limoges. Mais qui était-il ?

Jouer avec la lumière : voici l'objectif recherché par Francis Chigot, maître verrier reconnu à Limoges et en de nombreux points du globe. Chacun peut mesurer le travail d'orfèvre effectué par cet homme illustre et son équipe - qui a œuvré de 1903 jusqu'en 1960, année de sa disparition - en parcourant les allées du musée des Beaux arts, à l'Évêché de Limoges.

Une exposition lui est dédiée qui regroupe une cinquantaine de vitraux représentatifs du travail de toute une vie, ainsi que de nombreux croquis et cartons mis à disposition par les Archives départementales. Elle est visible jusqu'au 12 février. Cette exposition est le fruit d'un travail conjoint entre les responsables du musée et les membres de l'association des Amis de Francis Chigot.

Martine Tandeau-de-Marsac, vice-présidente et trésorière de cette association, est également historienne et la petite-fille de Francis Chigot. Elle travaille depuis de nombreuses années à mettre en lumière la vie de ce personnage illustre et trop méconnu à son goût. Une première exposition mise en place en 1980 s'était vue couronnée d'une médaille de bronze remise par le président Giscard-d'Estaing en personne. La deuxième arrive 42 ans plus tard. Elle est reconnue d'intérêt national par le ministère de la Culture.

De la décoration au vitrail

"Mon grand-père est né en 1879 à Limoges au sein d'un milieu d'artisans. Ses ancêtres étaient des tailleurs d'habits ; certains sont devenus tanneurs et son père peintre décorateur. Il posait des papiers peints, peignait les murs ou bien le verre", explique Martine Tandeau-de-Marsac. À la fin du XIXe siècle, Limoges est en pleine reconstruction avec la vague Haussman, la ville est en croissance. Il y a une importante population de bâtisseurs et on parle alors "d'immeubles d'importance". "À cette époque, on ajoute des salles de bain, des toilettes. Le confort apparaît, les cages d'escaliers s'embellissent et on met des vitraux à leurs fenêtres, avec surtout des fleurs", poursuit-elle. C'est dans cette ambiance que Francis Chigot grandit, puis fait ses études aux Arts déco de Limoges. En 1903, à la mort de son père, il reprend l'entreprise et, parce que Charles Bichet, professeur de peinture, lui avait conseillé de faire du vitrail, il se lance et fonde son atelier en 1907, en complément de son entreprise de décoration. "À l'époque, il propose ce petit supplément à ses clients et il ne s'arrêtera plus", note Martine Tandeau-de-Marsac. "Il va travailler avec des architectes, surtout un certain Geay qui, en lui délivrant un certificat, lui ouvre de nombreuses portes", ajoute-t-elle. Francis Chigot travaillera alors pour des bâtiments très variés et se fera connaître hors de Limoges.

Un travail d'équipe

La conception d'un vitrail part d'une commande. Francis Chigot a parcouru la France, est allé jusqu'au Canada et aux États-Unis... On retrouve même sa griffe sur les vitraux de Notre-dame de Conakry. Chaque commande a été ensuite traitée dans son atelier, situé à l'époque 9, boulevard de la Cité à Limoges. Parmi les dessinateurs qui ont œuvré à ses côtés, il y a Léon Jouhaud jusqu'au début des années 30, qui a beaucoup travaillé sur l'art nouveau, et Pierre Parot, qui a conçu entre autres les vitraux de la gare de Limoges, de l'église d'Oradour-sur-Glane, du Sacré-Cœur de Limoges...

Anticiper l'effet escompté

Le vitrail repose sur une mosaïque de plomb qui enchâsse des morceaux de verre ; c'est le plomb qui crée le dessin. Francis Chigot travaille avec 3 types de verres : les verres américains opalescents (qui offrent des variations de tons) ou bien chenillés (utilisés pour l'eau et ses reflets), les verres imprimés, blancs avec des reliefs de différentes sortes, et les verres antiques, essentiellement utilisés pour réaliser des vitraux destinés aux églises et aux monuments historiques. Ces verres antiques sont teintés dans la masse, puis le verre est soufflé. Les plaques ne sont pas uniformes et la lumière y joue différemment selon l'épaisseur. À l'époque, la gamme de coloris attachée à ces verres antiques était très importante.

Le choix des verres et des couleurs est fait attentivement, en fonction du dessin et du rendu espéré. Généralement, le plomb détermine les contours. Les détails dont les visages, les mains, les nervures des feuilles sont peints avec de la grisaille. "La grisaille sera beaucoup utilisée après les années 1950 ; elle donne de la profondeur. Elle est utilisée pour des fonds d'arabesques faits au pochoir, quand il y a moins de plomb", souligne Martine Tandeau-de-Marsac.

Les verres peints sont mis au four, à 620 °C. Puis l'ensemble des pièces est remonté. "La longévité du vitrail dépendra de la cuisson. Cent ans après, on s'aperçoit que les vitraux Chigot ont tenu dans le temps", remarque-t-elle. Et ont acquis une certaine notoriété.

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