« La limousine est la race performante par excellence ». Ce slogan est martelé par tous les acteurs de la race impliqués dans les différents organismes qui visent à développer et promouvoir la limousine. Une race performante ? Ça n'a pas toujours été le cas, et même certains propos lâchés sur cette pauvre vache pouvaient bien être fort désagréables. Le préfet d'Empire Louis Texier-Olivier, en poste en Limousin au début du XIXè siècle, estime que le Limousin se caractérise par la médiocrité de ces races animales et, parmi elles, la limousine est considérée comme une race de travail mal conformée et piètre laitière.
En fait, les qualités d'une race, ça va, ça vient en fonction de ceux qui s'en occupent et de ce qu'on en attend. De fait, à la fin du XVIIIè siècle, la limousine est justement réputée pour ses qualités de trait. Dans cette frange ouest du Massif Central, les bovins sont présents depuis la préhistoire et ils se sont adaptés aux conditions climatiques et géologiques. La limousine est donc une race rustique, dotée d'une ossature fine mais solide. Après 8 à 10 ans à tracter charrette, charrue et autres outils agraires, la vache est engraissée pour partir par la route et en une douzaine de jours sur les marchés de Paris, Lyon ou Toulouse. On les connaît sous le nom de bœufs limousins et ils pèsent dans les 300 à 350 kg.
La production herbagère
Ce marché spécifique décline donc à la fin du XVIIIè siècle et la première moitié du XIXè siècle n'est guère propice à la limousine. Des prairies pauvres, des travaux intenses aux champs et la mode des grands propriétaires terriens pour les grosses et grasses vaches anglaises sonnent presque le glas de la limousine. Presque seulement, parce que la seconde moitié de ce siècle sera celle du renouveau pour la race limousine. Tout d'abord, les premiers engrais de synthèse font leur apparition et de nouvelles plantes fourragères, comme le trèfle et le ray-grass, permettent d'améliorer les prairies qui prennent peu à peu le pas sur les landes de bruyère. du coup, la Haute-Vienne se spécialise peu à peu en production herbagère remplaçant notamment les vignes qui ont été dévastées par le phylloxéra.
Les résultats de ces évolutions culturales ne se font pas attendre et, dès le début des années 1860, les bœufs limousins atteignent en moyenne les 600 kg sur les marchés du Limousin. La réputation de la race limousine s'accroît, en particulier pour la qualité de sa viande ; elle est même désignée meilleure race européenne trois ans de suite entre 1857 et 1859. Dès lors, la sélection se met en place sous l'impulsion de grands propriétaires terriens et de leurs métayers qui se passionnent pour l'élevage de cette race. Encore faut-il définir ce qui la caractérise et l'écrire dans le marbre ? Suivant en cela ce qui se pratique depuis fort longtemps en Angleterre, le Herd-book de la limousine voit le jour en 1886. Très vite, les paysans s'en emparent et les foires et autres comices agricoles se multiplient en Haute-Vienne. Ils deviennent les lieux où s'échangent avec des discussions parfois interminables mais achevées par une poignée de main les meilleures vaches et les plus beaux taureaux.
Même si la limousine connaîtra encore des vicissitudes au cours du XXe siècle, la race peut prendre son essor et s'implanter dans le monde entier.