Amener des groupes de musiques actuelles connus ou moins connus, proposer des concerts de qualité en milieu rural en favorisant les rencontres sont les objectifs affichés par l'association Kulture Botte. Deux de ses membres fondateurs, Élie Pereira et Clarisse Bordonneau, mettent tout en œuvre depuis 2022 pour les atteindre. Et la dynamique qu'ils portent ensemble, au 10, La Roche, à La Bazeuge, tout là-haut dans le Haut-Limousin, s'installe doucement.
Derrière leur maison d'habitation, une vieille grange se transforme au fil du temps en lieu de concert tandis qu'en face une dépendance sert de buvette. Un peu plus loin, un espace sanitaire est aménagé et le jour J, les spectateurs ont la possibilité de déambuler, ou bien de s'installer en terrasse ou plutôt sur l'herbe.
Pour le lieu qui accueille les concerts portés par Kulture Botte, Élie et Clarisse ont choisi le drôle de nom d'Au Timbré Posté. Association apolitique et non militante, Kulture Botte réaffirme ainsi son choix d'être "fun", mais surtout ouverte et intégrée au territoire rural.
Pour le moment, elle compte trente adhérents et une dizaine de bénévoles sont actifs pendant la saison, lors de la mise en place et de la tenue des concerts.
Du hip-hop au new jazz
Outre le style de musique rencontré Au Timbré Posté, du hip-hop à l'électro-jazz en passant par la fusion, le punk, le nu-jazz et bien d'autres, un point relie les artistes qui acceptent de venir se produire ici : "Ils sont renommés mais indépendants, ils n'évoluent pas sous de grandes majors", précise Élie.
Quand ils se produisent Au Timbré Posté, "tout est déclaré, les musiciens et la Sacem sont payés", précise Élie. Les tarifs sont négociés et "les musiciens jouent le jeu pour pouvoir se produire chez nous. Ils sont vraiment solidaires de notre projet. Le concept proposé les séduit, notamment l'accueil assuré en toute simplicité. Dans l'invitation, je leur dis bien de venir avec leurs pantoufles", avoue Élie. Car, une fois le concert fini, ils passent se changer [à la maison, où ils sont logés] et reviennent, décontractés, discuter avec les personnes venues les écouter. "C'est vraiment hyper sympa après le concert d'échanger avec les artistes !", déclarent Clarisse et Élie. D'autant plus "qu'ici, on est les seuls à proposer ça", poursuivent-ils.
Un truc un brin surréaliste amuse Clarisse : "Début juin, Freeman, un ex-membre du groupe I Am, va faire escale Au Timbré Posté. On va aller le chercher à la gare du Dorat ! On va peut-être même l'accompagner au supermarché pour qu'il achète ses crèmes au chocolat..." Freeman est l'exemple type de l'importance d'amener à se rencontrer des mondes parfois très différents.
Remarqués, ils participent à une "incubation"
Le concept basé sur la convivialité, l'échange, les rencontres et surtout la diffusion de la culture en milieu rural n'a pas laissé indifférents l'incubateur de l'économie sociale et solidaire de Haute-Vienne (LIESS) et la fédération Hiero 87. "On a été recrutés pour la première promotion "culture" portée par ces deux entités", poursuivent les deux jeunes gens. Le parcours, finalisé en décembre dernier, a commencé en début d'année. L'objectif de cette aventure : professionnaliser l'action associative avec, en bout de chaîne, l'embauche de personnel par les associations.
Le déroulement de cette "incubation" mise sur trois rendez-vous en collectif par mois et sur des rendez-vous individuels. "Ceci doit nous donner des clés - dont un panorama global des aides qui existent -, ou bien nous faciliter les contacts avec des techniciens spécialisés dans différents domaines. On nous propose aussi des formations collectives sur différents thèmes comme la communication, la comptabilité dans la culture, les contrats d'artistes", note Clarisse. Bref, autant de points qui peuvent aider à "organiser des événements culturels qui ont un impact sur le territoire".
Des espoirs
"Avec cette incubation, j'espère qu'on va pouvoir monter en compétences et créer un vrai pôle de musiques actuelles dans le Nord Haute-Vienne", remarque Élie, un secteur où le théâtre est présent à Bellac, la musique classique à Villefavard. Il s'agit bien ici d'étoffer l'offre. Maintenant, Clarisse et Élie comptent sur la solidarité du territoire, notamment sur du mécénat solidaire et responsable, voué à la défense de l'accès à la culture en zone rurale, toujours en restant non militant. Et puis un jour, le "must" serait de trouver un vrai lieu pour accueillir des programmations toujours plus surprenantes.