Parler des Cuma, mettre l'accent sur cette forme de coopérative originale : c'est la mission que se sont donnée cinq étudiants en BTS au lycée agricole des Vaseix dans le cadre de leur Pic (Programme initiative et communication). Jeudi 20 octobre, Louane Morichon, Lucas Bourbouloux, Camille Golfier, Clément Cafiot et Lucie Simoneau ont travaillé avec une classe de seconde afin de recueillir les points de vue des élèves et décortiquer ce qu'est une Cuma. Ils ont misé sur une table ronde le matin, puis une série d'ateliers l'après-midi.
Tous connaissent le mot Cuma
Il est 10 h. Les élèves de seconde s'installent. La table ronde va pouvoir commencer. Afin d'alimenter les échanges, les résultats d'une enquête réalisée auprès de 70 élèves de profils variés sont annoncés. Il y a des points positifs dont la baisse des coûts de mécanisation, l'organisation de grands chantiers de récolte ou de travail du sol, l'entraide ou bien les échanges entre agriculteurs. Des points négatifs ressortent dont, par exemple, un entretien du matériel qui laisse parfois à désirer ou encore sa disponibilité. Une vidéo a ensuite présenté succinctement la FDCuma, son réseau et ses actions.
Pendant la matinée, les échanges seront riches. Feront-ils bouger les lignes ? À voir.
Appréhender l'investissement avant tout
Questionnés, les élèves de seconde disent connaître les Cuma, par leur famille quand ils sont issus du monde agricole, ou bien grâce à leur maître de stage pour les autres. Quelques-uns ne cachent pas leur méfiance vis-à-vis de ce mode d'organisation. "Mon oncle a arrêté car il y avait trop de problèmes de disponibilité du matériel quand il en avait besoin", indique l'un d'eux. "Certains mobilisent le matériel quand ils n'en ont pas besoin", remarque un autre. "Le frein pour moi est le suivi du matériel. On devrait tout marquer quelque part", ajoute un suivant. Stéphane Renou, le président de la FDCuma installé en élevage de bovins viande à Saint-Martin-le-Vieux, renchérit face à cette notion de "disponibilité" qui semble être un facteur bloquant. "Je ne supporte pas d'avoir du matériel dans la cour qui me regarde travailler. Par exemple, le matériel de fenaison permet de faire les foins mais pendant le reste de l'année il ne sert à rien. Alors il est disponible mais il coûte cher", remarque-t-il.
Les élèves insistent et l'un d'eux revient sur l'entretien du matériel. "Oui mais si on le garde plus longtemps, il ne coûtera au final pas plus cher", car il sera mieux entretenu laisse-t-il entendre... La question du coût de mécanisation est cependant cruciale : "Tout l'argent mis dans du matériel qui ne sert pas souvent est de l'argent qui ne va pas ailleurs, par exemple dans un bâtiment qui, lui, sert toute l'année", ajoute Stéphane Renou.
Les Cuma sont des coopératives
Ludovic Duhain, éleveur laitier installé à Beynac et très engagé dans le réseau Cuma, en appelle à l'implication des jeunes : "Par rapport à la question de l'entretien du matériel par exemple, est-ce que ça vous arrête complètement ou bien est-ce que vous décidez de vous investir et de faire bouger les choses ?" Car les Cuma sont des coopératives "à l'image des gens qui sont dedans". Elles sont aussi un appui. "Je me suis installé hors cadre familial, raconte Sébastien Sotte, trésorier de la FDCuma et éleveur de bovins viande à Beynac. Mon père était mécanicien agricole. Au départ on a acheté du matériel d'occasion qui tombait souvent en panne. Aussi, j'ai choisi la Cuma. On peut s'entendre avec tout le monde mais on est adhérent, pas client, ce qui demande une implication."
Sensibiliser les jeunes régulièrement
Thibault Guillaumin, qui s'est récemment installé en Gaec avec ses parents et sa sœur à Aixe-sur-Vienne, tient à apporter son témoignage. "Avant il n'y avait pas de cultures, que de l'herbe. Quand je me suis installé, j'ai dû changer les pratiques car j'ai mis en place un élevage de brebis. Du coup, j'ai voulu faire des céréales. C'était l'an dernier. Je me suis renseigné, j'ai chiffré le coût du semis sur 20 ha, j'ai comparé avec la Cuma et j'ai choisi la Cuma. On m'a écouté, conseillé car je n'avais jamais fait de céréales. Je vois beaucoup de points positifs à cette façon de travailler en commun, même s'il y a du bon et du mauvais partout. Et puis pour l'entretien et la disponibilité du matériel, ça se fait. Il faut y mettre un peu du sien", explique le jeune agriculteur. Sensibiliser les jeunes à l'intérêt de travailler ensemble, via ces drôles de coopératives, est pour Thibault Guillaumin très important. "J'aurais bien aimé qu'on organise ce type de journée quand j'étais à l'école (il a suivi un Bac STAV puis un BTS Productions animales aux Vaseix). Il y a beaucoup d'a priori à démonter car il existe beaucoup de Cuma où ça se passe bien. On devrait sensibiliser les élèves régulièrement", estime le jeune homme.
Une fédération pour les accompagner
Les Cuma sont des coopératives créées sur le terrain par le terrain ; elles sont encadrées au niveau départemental par une fédération - la FDCuma - qui développe plusieurs missions, rappelle Stéphane Renou. Par exemple, elle accompagne les Cuma lors de l'élaboration de leur DUER (Document unique d'évaluation des risques). Elle propose des formations, dont une relative aux engins de levage pour lesquels des vérifications sont nécessaires régulièrement. La FDCuma propose aussi un service juridique et de gestion des fiches de paie des salariés. Elle accompagne les Cuma lors de la mise en place de leur assemblée générale, lors de leur choix d'investissement, du montage des dossiers de demande de subventions, quand elles veulent mettre en place un GIEE...
Aujourd'hui, la fédération de Haute-Vienne mise sur une action intitulée "Un jeune, une solution Cuma". Les administrateurs espèrent qu'à partir de 2023 les jeunes qui s'interrogeront pour intégrer une Cuma soient conseillés. "L'équipe de la fédération est à disposition pour leur répondre", assure Stéphane Renou. Car "c'est parfois compliqué d'entrer dans un groupe mais c'est possible".